Restons dans le monde de l’art contemporain et voyons comment les artistes ont renouvelé le genre de la nature morte au cours de ces dernières années.
Débutons ce chapitre avec l’une des interprétations les plus remarquables d’objets trouvés/ready-made. Il s’agit d’un court-métrage intitulé Le Cours des choses, réalisé par le duo d’artistes suisses Peter Fischli et David Weiss. Dans ce film, on assiste à une folle réaction en chaîne d’objets domestiques et industriels (échelles, pneus, bouilloires, chaises, bidons en métal, ampoules, poêles…) qui glissent, tombent, rebondissent et explosent les uns après les autres en un gigantesque jeu de dominos.
La vidéo dure environ 30 minutes, mais il a fallu plus de deux ans pour la réaliser. Les artistes détournent totalement les objets utilisés qui semblent prendre vie avec un caractère qui leur est propre.
Le Cours des choses de Fischli et Weiss est une interprétation bruyante, imprévisible, amusante et violente d’objets trouvés qui prennent vie en s’émancipant de leurs fonctions habituelles.
L’installation est une forme artistique qui prend son essor dans les années 1960. Il s’agit habituellement de constructions à grande échelle réalisées à partir de toutes sortes d’objets et de matériaux : des effets personnels aux véritables détritus en passant par les objets abandonnés et recyclés. Le tout disposé dans l’espace de manière à créer un environnement dans lequel le public peut se promener ou avec lequel il peut interagir.
L’artiste britannique Cornelia Parker a réalisé une installation en faisant exploser un cabanon de jardin… avant de le ré-assembler. Elle a d’ailleurs demandé à l’armée de lui prêter main forte pour transformer ces bouts de bois en une installation ! Le cabanon de jardin n’est plus un endroit où les outils peuvent être rangés ; c’est une sculpture en lévitation composée de mille morceaux de bois suspendus au plafond.
Les installations utilisent des matériaux communs pour créer des structures ou des environnements immersifs avec lesquels le public peut interagir.
Au cours des années 1960, les artistes ont beaucoup utilisé la photographie et la vidéo pour saisir des instants précis de leur quotidien. Cela a d’ailleurs amené même le photographe allemand Wolfgang Tillmans à photographier… ses chaussettes !
Ce cliché banal, de vie domestique, montre des chaussettes abandonnées sur un canapé, qui attendent que quelqu’un les range. On dirait une photographie prise à l’improviste, pourtant, la simplicité de cette photo est trompeuse ! Wolfgang Tillmans crée des compositions très mises en scène et consacre beaucoup de temps à organiser les éléments de ses natures mortes.
Ce film de l’artiste Samantha Taylor-Johnson est une interprétation vidéo cette fois-ci, de la nature morte. Bien que son thème (le temps qui passe) soit vieux comme le monde, cette vidéo de fruits en train de pourrir transmet cette idée de manière bien plus directe qu’un tableau du 17e siècle !
Sam Taylor-Johnson ajoute un autre élément indiquant qu’il ne s’agit pas d’une nature morte traditionnelle. Sauriez-vous le trouver ?
Les artistes utilisent la photo et la vidéo pour moderniser la nature morte. Sam Taylor-Johnson réalise des vidéos en time-lapse qui montrent des aliments qui se décomposent, et Wolfgang Tillmans crée des compositions simples à première vue mais pourtant très mises en scène.
Il n’est pas rare qu’un artiste collabore avec d’autres personnes. Au Moyen-Âge et à la Renaissance, les artistes avaient des ateliers qui fourmillaient d’apprentis, et même Andy Warhol s’appuyait sur ses assistants pour réaliser ses œuvres. Comme on l’a souvent évoqué ici, la plupart des mouvements artistiques sont nés grâce à des groupes d’artistes amis (ou d’ennemis) qui, ensemble, explorent des idées novatrices et repoussent les limites.
De nos jours, il est courant que les artistes créent des œuvres avec l’aide du public. Dans certains cas, cette collaboration est même indispensable à la création de l’œuvre et lui donne un aspect unique et spécial.
Par exemple, l’artiste américain Mark Dion a demandé à un groupe de bénévoles londoniens de l’aider à ratisser les rives de la Tamise afin de voir ce l’on y trouve. Ensemble, ils ont ramassé des centaines d’objets (des pipes en terre cuite, des jouets en plastique, des ossements d’animaux…), qui ont été disposés dans une vitrine qui rappelle les cabinets de curiosité. Ces élément portant simples et sans valeur apparente constituent une collection mystérieuse d’objets témoins de notre époque.
Un bel exemple d’œuvre réalisée à partir d’objets trouvés !
L’artiste autrichien Erwin Wurm a trouvé, lui aussi, une façon originale d’impliquer le public dans son travail. Il invite des spectateurs à suivre des consignes précises qui leur demandent d’interagir avec des objets du quotidien (des stylos, des vêtements, des ballons…) disposés dans l’espace d’exposition. Ils vont alors devoir se glisser dans un une robe, se tenir en équilibre sur un seau ou serrer une pastèque dans leurs bras.
Petite précision : ils ont une minute top chrono pour s’exécuter donc pas le temps de réfléchir !
Les artistes travaillent souvent en collaboration avec d’autres personnes pour réaliser leurs œuvres, notamment lorsqu’il faut réunir des objets disparates afin de créer une sorte de collection.
Avant que le rideau ne tombe (pardon pour ce jeu de mots), intéressons-nous à l’œuvre de Christo, qui avait l’habitude d’emballer les objets. Et il ne s’agissait pas uniquement des petites choses comme ces boîtes de conserve ; il emballait aussi des voitures, des monuments et même des ponts !
Au cours de sa carrière, Christo, accompagné de sa collaboratrice (et épouse) Jeanne-Claude, ont emballé le palais du Reichstag à Berlin, empaqueté le Pont-Neuf à Paris et déployé 200 000 m² de toile de nylon blanche dans le désert californien.
Ces projets monumentaux modifient la façon dont nous percevons les villes et les paysages, en donnant un aspect totalement nouveau à ce qui nous est familier. La dernière création de ce duo artistique s’est tenue à Paris récemment. Depuis des années, Christo et Jeanne-Claude voulaient emballer l’Arc de Triomphe ! Malgré le soutien de plusieurs élus de la ville, ce projet n’a vu le jour qu’en 2021, après le décès des deux artistes.
En employant des matériaux qui bougent avec le vent et qui réfléchissent la lumière, Christo et Jeanne-Claude voulaient créer un « objet vivant » que les « gens auraient envie de toucher ».
Aujourd’hui, les natures mortes sont toujours bien vivantes ! Les artistes continuent de réinventer et de métamorphoser les objets du quotidien pour donner à l’ordinaire, un parfum d’extraordinaire.
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