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Photographie et vidéo
Wolfgang Tillmans, Strümpfe (Chaussettes),
2002 © Wolfgang Tillmans et Maureen Paley, Londres Photo : Tate

Au cours des années 1960, les artistes ont beaucoup utilisé la photographie et la vidéo pour saisir des instants précis de leur quotidien. Cela a d’ailleurs amené même le photographe allemand Wolfgang Tillmans à photographier… ses chaussettes !

 

Ce cliché banal, de vie domestique, montre des chaussettes abandonnées sur un canapé, qui attendent que quelqu’un les range. On dirait une photographie prise à l’improviste, pourtant, la simplicité de cette photo est trompeuse ! Wolfgang Tillmans crée des compositions très mises en scène et consacre beaucoup de temps à organiser les éléments de ses natures mortes.

Ce film de l’artiste Samantha Taylor-Johnson est une interprétation vidéo cette fois-ci, de la nature morte. Bien que son thème (le temps qui passe) soit vieux comme le monde, cette vidéo de fruits en train de pourrir transmet cette idée de manière bien plus directe qu’un tableau du 17e siècle !

 

Sam Taylor-Johnson ajoute un autre élément indiquant qu’il ne s’agit pas d’une nature morte traditionnelle. Sauriez-vous le trouver ?

Sam Taylor-Johnson, Nature morte,
2001, film 35 mm/DVD, 3,44 minutes © Sam Taylor-Johnson. Tous droits réservés, DACS/Artimage 2023
Pour résumer

Les artistes utilisent la photo et la vidéo pour moderniser la nature morte. Sam Taylor-Johnson réalise des vidéos en time-lapse qui montrent des aliments qui se décomposent, et Wolfgang Tillmans crée des compositions simples à première vue mais pourtant très mises en scène.

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Installation
Cornelia Parker, Cold Dark Matter: An Exploded View (Matière noire froide : une vue explosée),
1991. Wood, metal, plastic, ceramic, paper, textile and wire. © Cornelia Parker Photo: Tate
Hugo Glendinning, Cold, dark matter, an exploded view (Matière sombre froide, vue explosée),
© Hugo Glendinning

L’installation est une forme artistique qui prend son essor dans les années 1960. Il s’agit habituellement de constructions à grande échelle réalisées à partir de toutes sortes d’objets et de matériaux : des effets personnels aux véritables détritus en passant par les objets abandonnés et recyclés. Le tout disposé dans l’espace de manière à créer un environnement dans lequel le public peut se promener ou avec lequel il peut interagir.

 

L’artiste britannique Cornelia Parker a réalisé une installation en faisant exploser un cabanon de jardin… avant de le ré-assembler. Elle a d’ailleurs demandé à l’armée de lui prêter main forte pour transformer ces bouts de bois en une installation ! Le cabanon de jardin n’est plus un endroit où les outils peuvent être rangés ; c’est une sculpture en lévitation composée de mille morceaux de bois suspendus au plafond.

Pour résumer

Les installations utilisent des matériaux communs pour créer des structures ou des environnements immersifs avec lesquels le public peut interagir.

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Les objets font les 400 coups

Restons dans le monde de l’art contemporain et voyons comment les artistes ont renouvelé le genre de la nature morte au cours de ces dernières années.

 

Débutons ce chapitre avec l’une des interprétations les plus remarquables d’objets trouvés/ready-made. Il s’agit d’un court-métrage intitulé Le Cours des choses, réalisé par le duo d’artistes suisses Peter Fischli et David Weiss. Dans ce film, on assiste à une folle réaction en chaîne d’objets domestiques et industriels (échelles, pneus, bouilloires, chaises, bidons en métal, ampoules, poêles…) qui glissent, tombent, rebondissent et explosent les uns après les autres en un gigantesque jeu de dominos.

 

La vidéo dure environ 30 minutes, mais il a fallu plus de deux ans pour la réaliser. Les artistes détournent totalement les objets utilisés qui semblent prendre vie avec un caractère qui leur est propre.

Peter Fischli et David Weiss, Der Lauf der Dinge (Le Cours des choses),
1987, Vidéo couleur, film 16 mm, avec son, 30 min, © Sprüth Magers, Matthew Marks Gallery, Galerie Eva Presenhuber, © Succession Peter Fischli David Weiss
Pour résumer

Le Cours des choses de Fischli et Weiss est une interprétation bruyante, imprévisible, amusante et violente d’objets trouvés qui prennent vie en s’émancipant de leurs fonctions habituelles.

Pour résumer, vous avez découvert :

  • L’essor du Pop Art en Grande-Bretagne et aux États-Unis
  • Qu’est-ce qui fait le succès du Pop Art ?
  • Production de masse
  • Roy Lichtenstein
  • Claes Oldenburg et Coosje van Bruggen
  • L’héritage du Pop Art 
POUR S’ENTRAÎNER

Le pop art est souvent décrit comme étant :

Vous devez choisir une réponse

La bande-dessinée et le dessin humoristique étaient une source d’inspiration pour quel artiste « pop » américain ?

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Quel procédé d’impression mécanique Andy Warhol utilisait-il pour produire ses œuvres en multiples exemplaires ?

Vous devez choisir une réponse

Vous avez débloqué l’épisode suivant dans votre parcours L’art du quotidien – Natures mortes modernes et contemporaines.

CHAPITRE 4

Transformer le quotidien

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L’héritage du Pop Art

Le Pop Art, qui réinterprète le ready-made à sa sauce, laisse derrière lui un immense héritage et continue d’influencer l’iconographie culturelle actuelle.

 

L’artiste chinois Ai Weiwei fait partie des artistes dont le travail est souvent exposé aux côtés de celui d’Andy Warhol. Cela permet d’explorer les parallèles entre leurs œuvres, bien qu’elles appartiennent à des contextes géographiques et à des époques différents.

 

Comme Warhol avant lui, Weiwei se sert de la marque Coca-Cola pour évoquer le capitalisme. Il a, par exemple, inscrit le logo Coca-Cola sur une ancienne urne chinoise pour dénoncer le communisme, et crée ainsi son propre symbolisme subversif.

Et ce n’est pas leur seul point commun : tous deux font directement référence à Marcel Duchamp ! Warhol avec son œuvre Screen Test : Marcel Duchamp, 1966 et Ai Weiwei avec Hanging Man in Porcelain, un portrait de Duchamp façonné à partir d’un cintre métallique.

Ai Weiwei, Urne de la dynastie Han avec logo Coca-Cola
1993 © Ai Weiwei Studio et Lisson Gallery
Ai Weiwei, Hanging Man (Silver), 
2009, Argent, porcelaine et bois Huali, 50 × 44 cm © Ai Weiwei Studio et Lisson Gallery
Photographié par Prudence Cuming Associates Ltd. © Damien Hirst et Science Ltd.,
© DACS/Artimage 2024.
Damien Hirst, The Last Supper (La Cène),
1999 © Damien Hirst et Science Ltd. Tous droits réservés, DACS/Artimage. Photo : Stephen White & Co.
Damien Hirst, Steak and Kidney (Steak et rognons),
1999 © Damien Hirst et Science Ltd. Tous droits réservés, DACS 2024

Nous avons évoqué plus tôt Damien Hirst et Tracey Emin, deux membres des Young British Artists, un groupe d’artistes britanniques des années 1990.

 

Le travail d’Hirst et son attitude irrévérencieuse fascinent le public et la critique depuis qu’il a organisé l’exposition Freeze en 1988, alors qu’il était encore étudiant. Dans ses œuvres, il se sert d’objets du quotidien avec humour et ironie : des cadavres d’animaux coupés en deux, des faux emballages de médicaments…

 

Sa série The Last Supper  (La cène) ressemble à une mauvaise blague sur le thème médical. Selon lui, nous avons remplacé notre foi en la religion par notre foi en la médecine. Il tente alors de nous faire réfléchir à la place que la médecine a dans notre alimentation actuelle.

 

Son œuvre aborde les mêmes thèmes que les natures mortes néerlandaises du 17e siècle et que le travail d’Andy Warhol : la mort, la richesse, la religion et la finitude de l’existence.

Pour résumer

On retrouve l’héritage du Pop Art partout autour de nous : dans les œuvres d’autres artistes mais aussi dans la publicité, les emballages et la culture visuelle actuelle.

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Claes Oldenburg et Coosje van Bruggen
« Mon travail ne suit pas les mêmes règles que celui d’Andy [Warhol]. Pourtant on associe mon œuvre à la sienne pour la simple raison que nous avons tous deux travaillé sur les images et les objets autour de nous. »
Claes Oldenburg

Certains artistes, dont le sculpteur et graphiste Claes Oldenburg, ont créé des œuvres en transformant des objets qu’ils ont répliqués à une échelle monumentale.

 

Par exemple, cet énorme cône de glace semble être tombé du ciel pour s’écraser sur l’angle de cet immeuble de Cologne.

 

Il a réalisé cette œuvre avec sa compagne et collaboratrice Coosje van Broggen. Son interprétation spectaculaire de la nature morte cherche à surprendre et à faire rire les spectateurs. On ne s’attend pas, en visitant un musée, à tomber sur un hamburger géant en plastique mou ou à trouver un gigantesque vélo à moitié enterré dans un parc !

 

Jeff Koons s’est lui aussi appuyé sur la popularité du Pop Art. Ses sculptures colorées, comme Balloon Dog (Red), se caractérisent par leur forme – inspirée des ballons en forme d’animaux, réalisés par les clowns. Imaginez un chien gonflable qui mesure plus de 3m, mais qui, au lieu d’être fait en caoutchouc, est réalisé en métal poli avec une surface brillante !

Claes Oldenburg et Coosje van Broggen, Dropped Cone à Cologne,
2016, Photo : Christoph Seelbach Creative Commons
Jeff Koons, Baloon Dog (Rouge),
toit du Metropolitan Museum of Art, New York
Pour résumer

De nombreux artistes ont surfé sur la vague du Pop Art pour créer une version magnifiée des objets, produisant des natures mortes aux dimensions colossales.

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Roy Lichtenstein

Parmi les œuvres les plus emblématiques du Pop Art, on trouve celles de l’artiste américain Roy Lichtenstein. Il est connu pour avoir repris le style et les sujets propres à la bande-dessinée en les transformant en tableaux de grand format.

 

Dans les années 1970, Lichtenstein a exploré certains genres classiques dont la nature morte.

Ici, on retrouve la composition traditionnelle des natures mortes du 17e siècle. Dans le premier exemple, l’artiste peint des fruits et de la vaisselle mais il y ajoute un portrait encadré pour moderniser le tout. Dans le second, le bouquet de fleurs est relégué au second plan tandis que les outils de l’artiste (pinceaux, palettes, toiles…) composent le sujet principal de la peinture.

Roy Lichtenstein, Nature morte avec portrait,
1974, © Succession Roy Lichtenstein/DACS 2024
Roy Lichtenstein, Nature morte avec palette,
1974 © Succession Roy Lichtenstein/DACS 2024.
Roy Lichtenstein, Drowning Girl (« Fille qui se Noie »),
1963, Museum of Modern Art, New York © Estate of Roy Lichtenstein New York / ADAGP, Paris 2021. Photo : Gandalf’s Gallery, CC BY-NC-SA 2.0
« Lorsque nous pensons aux natures mortes, nous pensons à des peintures qui ont une certaine atmosphère ou ambiance. Mes natures mortes n’ont aucune de ces qualités, elles présentent simplement des images de certaines choses qui font partie d’une nature morte, comme des citrons, des pamplemousses, etc. Elles n’ont pas la signification habituelle d’une nature morte. »
Roy Lichtenstein
Pour résumer

La démarche artistique de Roy Lichtenstein s’inspirait principalement de la publicité et de la bande-dessinée.

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Production de masse
Andy Warhol en 1984.
Photo: © Bridgeman Images

Andy Warhol a érigé certains objets en véritables icônes ! Avec ses reproductions de bouteilles de Coca-Cola, de boîtes de lessive Brillo ou encore de conserves de soupe Campbell, ces objets du quotidien sont devenus des œuvres d’art emblématiques. On raconte que Warhol a mangé de la soupe Campbell tous les jours au déjeuner pendant 20 ans ! Il s’agissait visiblement de l’un de ses plats préférés.

 

Ce petit côté obsessionnel explique peut-être son intérêt pour la sérigraphie. Cette technique d’impression permet de reproduire une image à l’infini en variant uniquement les couleurs. Jusqu’alors utilisée principalement par les publicitaires, la sérigraphie a permis à Warhol de transformer des objets ordinaires en les agrandissant, comme si ses œuvres étaient de véritables panneaux publicitaires.

En s’appuyant sur ce procédé mécanisé, Warhol a brouillé les frontières entre l’art et le commerce. Ses œuvres étaient visuellement percutantes, mais aussi très rentables. Son travail reflète bien l’intérêt de l’artiste pour la convergence de l’art et de la société de consommation. La carrière de Warhol était particulièrement diversifiée : il a réalisé des œuvres vidéos, des peintures mais il a aussi étendu son rôle d’artiste en s’occupant lui-même des relations publiques ou même du marketing ! C’est un créateur complexe et prolifique qui a lancé l’idée selon laquelle un artiste peut également être un véritable homme d’affaire.

Andy Warhol, 32 Campbell’s Soup Cans (« 32 Boîtes de Soupe Campbell »),
1962, peinture sur 32 toiles, 50,8 x 40,6 cm (chaque toile), Museum of Modern Art, New York © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc. / ADAGP, Paris 2021. Photo : rocor, CC BY-NC 2.0
Andy Warhol, Brillo Box (« Boîte Brillo »),
1964, 43.3 x 43.2 x 36.5 cm, Metropolitan Museum of Art, New York © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc. / ADAGP, Paris 2021. Photo : Ian Abbott, CC BY-NC-SA 2.0
Andy Warhol, Coca-Cola 210 Bottles (« 210 bouteilles Coca-Cola »),
1962, encre de sérigraphie, polymère synthétique et graphite sur toile, 209,6 x 266,7 cm © The Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Inc. / ADAGP, Paris 2021. Photo : © Christie’s Images / Bridgeman Images
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Andy Warhol conférait aux objets du quotidien le statut d’icône. Plus ils étaient familiers, mieux c’était ! Il utilisait des procédés mécaniques comme la sérigraphie, pour produire un grand nombre d’images rapidement.

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Qu’est-ce qui fait le succès du Pop Art ?
« Le Pop Art est : Populaire (destiné aux masses), Éphémère (à court terme), Consommable (facilement oubliable), peu coûteux, produit en série, jeune (destiné aux jeunes), spirituel, sexy, gadget, glamour, gros business. »
Richard Hamilton, 1957

Mais quel est le rapport avec la nature morte ? C’est le sujet : les objets du quotidien !

Le Pop Art adopte les critères esthétiques des médias et de la production de masse, comme les couleurs vives, les lignes épurées et les éléments caractéristiques des bandes-dessinées et des emballages de produits. Tout en s’inspirant également des objets du quotidien, peu coûteux et produits en masse.

Richard Hamilton, Just what is it that makes today’s homes so different, so appealing ?
(« Qu’est-ce qui rend exactement les maisons d’aujourd’hui si différentes, si séduisantes ? »), 2004, impression sur papier, 26 × 25 cm, Tate Modern, Londres © Richard Hamilton 2018. All rights reserved, DACS. Photo : © Tate, CC-BY-NC-ND 3.0
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Le Pop Art était audacieux, coloré et humoristique et ses artistes étaient fascinés par la culture populaire, la société de consommation et la production de masse.

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L’essor du Pop Art en Grande-Bretagne et aux États-Unis

Le Pop Art est généralement associé aux artistes américains comme Andy Warhol ou Roy Lichtenstein. En réalité, ce mouvement a émergé dans les années 1950 en Grande-Bretagne avant de s’exporter rapidement aux États-Unis. 

 

 L’Independent Group (Londres, 1952 – 1955) rassemblait des peintres, sculpteurs, architectes, écrivains et critiques d’art, tous désireux de remettre en question les approches modernistes qui dominaient le monde de l’art à l’époque. 

 

À Londres, des artistes de ce groupe comme Eduardo Paolozzi et Richard Hamilton, ainsi que d’autres artistes britanniques comme Pauline Boty et Peter Blake, créent des collages à partir de bandes-dessinées, de publicités et de portraits de célébrités. 

Photographe inconnu, Photographie montrant Nigel Henderson, Eduardo Paolozzi, Alison et Peter Smithson assis dans une rue non identifiée,
Vers 1949-1956. Offert aux archives de Tate par Stephen et Jo Henderson ainsi que les familles Henderson, juin 2010. © Succession Nigel Henderson / Tate
Sir Eduardo Paolozzi, Les jouets d’un homme riche,
Papiers imprimés sur carton, 35,9 x 23,8 cm, Tate © Succession d’Eduardo Paolozzi Photo : Tate
Richard Hamilton, Intérieur II,
Peinture à l’huile, peinture à la cellulose et papier imprimé sur panneau, 121,9 x 162,6 cm, Tate © Succession de Richard Hamilton Photo : Tate
Peter Blake, Autoportrait avec des badges,
Peinture à l’huile sur panneau, 174,3 x 121,9 cm, Tate. © Peter Blake 2018. Tous droits réservés, DACS Photo : Tate
Pauline Boty, La seule blonde du monde,
1963, peinture à l’huile sur toile, 122,4 x 153 cm. © Succession de Pauline Boty, Tate, Londres. Photo : Tate

Bien que le Pop Art britannique et le Pop Art américain aient présenté des divergences en termes de style et de techniques, les deux mouvements avaient en commun la volonté d’effacer les frontières entre les formes d’art dites « supérieures » et celles dites « inférieures ». À l’époque, le monde avait déjà découvert et accepté les mouvements contestataires comme le cubisme ou le surréalisme mais personne encore ne considérait la culture populaire comme de l’art !

 

Tiens tiens, encore ces histoires de hiérarchie…

Pour résumer

Le Pop Art efface les frontières entre les arts dits « supérieurs » et les arts considérés comme « inférieurs » en s’appuyant sur des matériaux et des sujets issus de la vie quotidienne.